
Cumul des qualifications pénales et principe de ne bis in idem : rappel des conditions jurisprudentielles
Publié le :
03/10/2025
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Issu du droit romain, le principe ne bis in idem consacre l’idée que nul ne peut être poursuivi ou sanctionné deux fois pour les mêmes faits. Inscrit à l’article 368 du Code de procédure pénale, il traduit pleinement l’autorité de la chose jugée en matière pénale et répond à un double objectif : assurer la sécurité juridique et protéger les libertés individuelles.
Le 18 juin dernier, la Cour de cassation s’est prononcée sur une affaire dans laquelle un prévenu était poursuivi devant le tribunal correctionnel pour transport, détention, offre ou cession, acquisition et importations illicites de stupéfiants, et pour association de malfaiteurs en récidive. Reconnu coupable en première instance, il avait relevé appel de la décision.
Tout l’enjeu était de savoir si le principe ne bis in idem interdisait de cumuler deux qualifications, autrement dit l’association de malfaiteurs et la législation sur les stupéfiants, lorsque les faits sont étroitement liés.
Se fondant sur ce principe, la Chambre criminelle rappelle que l’interdiction de cumuler les qualifications s’applique uniquement lorsque des faits identiques sont en causes et dans les situations suivantes :
- L’une des qualifications correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l’autre qui, seule, doit être retenue ;
- L’une des qualifications retenue, dite « spéciale », incrimine une modalité spécifique de l’action répréhensible sanctionnée par l’autre infraction, dite « générale ».
Pour interdire le cumul, deux conditions doivent être simultanément réunies : l’identité des faits matériels caractérisant les infractions en concours, et leur définition légale. Si l’une de ces conditions n’est pas remplie, le cumul est autorisé.
Dans les faits, les infractions de trafic de stupéfiants et d’association de malfaiteurs sont juridiquement distinctes et ne forment pas un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l’autre. De plus, aucune de ces deux infractions ne constitue une modalité particulière de l’action répréhensible sanctionnée par l’autre infraction. Le cumul des qualifications est donc possible, même si les faits sont liés.
Par conséquent, la Cour d’appel qui avait relaxé le prévenu du chef d’association de malfaiteurs au motif que les faits étaient indissociables de ceux relatifs aux stupéfiants a méconnu le principe ne bis in idem. En effet, elle n’avait pas vérifié que les éléments constitutifs de cette infraction étaient effectivement réunis. La Cour de cassation a donc cassé et annulé cet arrêt uniquement pour les dispositions relatives à la relaxe et aux peines.
Cette décision réduit l’importance du principe ne bis in idem, en restreignant de façon considérable les conditions dans lesquelles le cumul des qualifications est interdit dans une même affaire.
De facto, le cumul des qualifications pour de mêmes faits n’est plus interdit par principe.
Les avocats de la défense devront se battre encore davantage pour éviter à leurs clients des condamnations alourdies au motif qu’ils auraient commis deux infractions et non une seule.
Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 18 juin 2025, n°24-84.803
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